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jeudi 23 novembre 2017

JIM WHITE ~ Waffles, Triangles & Jesus [2017]


"The whole damned world is playing guitars."
T’as des mecs ils font toujours le même disque. Ouais, des nanas aussi bien sûr, faudrait peut-être se mettre à l’écriture officielle, comment qu’ils l’appellent déjà, je sais plus, on écrirait des mec.e.s c’est ça ? Nous voilà bien. Quoi qu’il en soit on leur en veut pas (aux mec.e.s qui font toujours le même disque) c’est pour ça qu’on les aime, on a adoré leur premier disque et roule ma poule. Des fois ils sortent un chef d’œuvre, soit le même disque mais en mieux. T’as des mec.e.s (ok c’est la dernière, promis j’arrête) qui touchent à tout et au reste. Seuls ou accompagnés : et que je joue avec untel, et que je te produis Machin, et que je te filme un documentaire improbable hé ouais puisque que je touche à tout. T’en as qui incarnent à eux seul un genre défini, d’autres qui sont un genre à eux tout seul, j’espère que vous saisissez la différence sinon vous pouvez toujours demander je vous expliquerai pas, merde, faites un effort. Et t’as Jim White qui fait tout ça à la fois. On reprend ? Americana, ce terme qu’on abhorre, on dirait qu’il a été inventé pour notre Héros du jour, non mais écoutez-moi ça… et ouais, trois chansons plus tard ça vole en éclats. Et là tu te retrouves avec du Jim White tel que seul Jim White sait en faire, ce que les trente-sept (à vue de nez…) premières secondes du premier morceau t’avaient laissé subodorer. Avant que telle ou telle orientation jazz ou gospel ou autre ne t’amène à te demander: "mais qu’est-ce que j’écoute ?" Et là, temps d’arrêt, puis tu te réponds : "mais c’est du Jim White !". Le tout bien sûr tout haut avec l’intonation utilisée quand on raconte la blague sur les mec.e.s (ah merde…) qui habitent près de Niagara Falls. Pas de surprise pour l’orientation Appalachienne par contre, y a pas si longtemps JW cosignait un disque bluegrass avec un groupe de traditionalistes modernes du genre (ça fait peur hein ?) basé à Athens, son nouveau domicile et ma Rock-City à moi. Bien loin de Niagara Falls j’en conviens mais l’ami Jim (je dis l’ami Jim parce qu’en fait y a quelques années j’ai participé au crowd-funding de l’un de ses disques, pas assez pour qu’il vienne jouer à la maison, ce qui était prévu à partir d’un certain montant mais j’ai décidé de faire comme si…) est un pur sudiste, initialement du fin fond tordu et marécageux de la Floride. Là c’est lui qui invite, au hasard Holly Golightly (vous vous souvenez de Holly Golightly ? Non ? Tant pis) sur cet énormissime Earnest T. Boss… au titre magnifiquement taré, JW est un spécialiste des titres tarés, chanson comme album. A propos, mon album préféré du Jim, celui que je trouvais de loin le meilleur parmi tous les identiques/différents qu’il a sortis, c’était: Drill a hole in that substrate and tell me what you see, si ça c’est pas un titre taré, et cet incroyable premier morceau en duo avec, avec… Aimee Mann bien sûr ! Z’aimez pas Aimee (haha) ? Moi chuis dingue d’elle. Et je dis pas ça pour tenter (en vain) de contrecarrer les idées préconçues d’Audrey sur mes préférences sexuelles non non, j’aime Aimee, j’ai tous ses disques. Ceci posé (les nanas donc, ou les mec.e.s) sa collaboration la plus déglinguée et perverse fut bien Hellwood, cet incroyable et éphémère duo que Jim fonda avec Johnny Dowd et qui nous donna cet inclassable: Chainsaw of life chroniqué en son temps chez Marius (et par John Warsen un peu plus tard, je sais que tu guettes ..) Je crois bien vous avoir déjà parlé de Johnny Dowd, j’adore Johnny Dowd. Mais mais mais mais mais : tout ça c’était avant. Avant ce double-vinyle que vous tenez entre les mains (c’est encore la fête à Zen Arcade !), so to speak comme disent nos amis britons, au titre tordu mais on en a pris l’habitude, et à la magnifique pochette. Jim White fait toujours de magnifiques pochettes et c’est "lui qui les fait" (à dire bien sûr avec l’intonation de… ok j’arrête). Les disques de Jim White m’ont toujours donné envie de rire, pleurer, chanter, comprendre ce qui s’y passait vraiment et être enfin invité à cette table ou mangent ensemble, entre autres convives dépenaillés, Dieu et le Diable sans qu’il soit vraiment possible de bien les distinguer, le rêve de tout athée qui se respecte. Mais jamais, JAMAIS autant qu’à l’écoute de Waffles, triangles & JesusCe truc m’a laissé béat, sans voix et démuni de quelque argument que ce soit pour vous le recommander (c’est pour ça que j’ai fait court, en plus j’ai pas le temps faut que j’aille bosser) autre que ce bref commentaire privé à Jimmy sur un post d’Audrey: "Il se pourrait bien que le dernier Jim White (après quatre écoutes successives) soit son meilleur." Après vingt écoutes successives je me dis qu’il serait bon que je vous en fasse une chronique, vous risqueriez sinon de passer à côté. J’attends d’abord de redescendre de mon nuage sinon je serais capable d’écrire des conneries.
Everett W. GILLES [Vous prendrez bien le temps d’un petit commentaire !]

Qu'allons-nous devenir si chaque album de Jim White est supérieur au précédent ?! Pas plus tard qu'hier, il était question de disques qui rendent heureux: si je n'étais pas si impatient que vous le découvriez, je vous conseillerais de l'écouter un dimanche matin à la météo bien morose: il vous sauverait le week-end et la poignée de mois suivants ! Pour faire la nique à cette époque qui voudrait que tout soit terminé avant de commencer, Waffles, triangles & Jesus se vautrent allègrement dans les tempos lents. Pour faire la nique à cette époque qui prétend que tout a déjà réalisé cent fois, mille fois, Jim White réinvente le folklore américain qu'on pensait usé jusqu'à la dernière vieille corde de banjo pourri. Un tas de jeunes groupes se croient malins en mélangeant tout ce qui leur tombe sous la main: la plupart du temps, c'est aussi ragoutant que de manger une choucroute à la merguez ! Ici, l'affaire est un tantinet plus subtile - tellement, en fait, qu'on ne pige absolument rien aux trucs que la langue est en train de nous faire dans l'oreille ! D'accord, il y a bien ce batteur qui semble inventer son instrument à mesure qu'il joue, ce violon qui chatouille comme si nous possédions un clitoris auditif ou cette trompette échappée d'un nulle part féerique, mais ça n'explique pas tout... Avec l'air (presque) innocent de ne pas y toucher, Jim White réinvente la jeunesse sans toucher à un bistouri. Ce type est un magicien. Merci de ne pas ménager vos applaudissements avant de quitter la salle pour retourner dans la vie !  
Jimmy JIMI             



01 - Drift Away
02 - Long Long Day
03 - Playing Guitars
04 - Far Beyond The Spoken World
05 - Silver Threads
06 - Prisoner's Dilemma
07 - Reason To Cry
08 - Wash Away A World
09 - Earnest T. Bass At Last Finds The Woman Of His Dreams
10 - Here I Am
11 - Sweet Bird Of Mystery
MP3 (320 kbps) + front cover